En février dernier, la start-up The Browser Company a lancé Arc Search, une application iPhone qui propose une nouvelle façon de naviguer sur le web.

Sa fonction innovante « Browse for Me » synthétise les informations de plusieurs pages web en une seule page unique, personnalisée et formatée par Arc. Cette innovation utilise des modèles de langage d’OpenAI et d’autres sources. De plus, Arc Search bloque par défaut les publicités, les cookies et les traqueurs, offrant une expérience de navigation plus fluide et sécurisée.

Si l’innovation d’Arc a été saluée par la plupart, la fonction « Browse for Me » a récemment essuyé des critiques. La question centrale : qui rémunère les créateurs lorsque l’IA détourne et réutilise leurs contenus ?

L’IA et la fin de la publicité en ligne ?

Depuis des décennies, les sites Web diffusent des publicités et incitent les internautes à payer des abonnements. La monétisation du trafic est l’un des principaux moyens utilisés par la plupart des créateurs de contenu en ligne pour gagner leur vie. En réduisant la nécessité pour les internautes de visiter des sites Web, on prive ces créateurs d’une rémunération pour leur travail et on les décourage de continuer à publier.

Dans un tweet, un ingénieur logiciel de renom a exprimé son inquiétude quant à l’impact d’un nouveau navigateur web sur les créateurs de contenu.

Je comprends que cela aide les utilisateurs. En quoi cela aide-t-il les créateurs ? Sans eux, il n’y a pas de Web…

Ce navigateur, qui utilise l’intelligence artificielle pour synthétiser des informations provenant de plusieurs pages web, pourrait détourner le trafic des sites web originaux et priver les créateurs de revenus.

Le PDG de la société à l’origine du navigateur a reconnu que le modèle économique actuel du Web était imparfait et a suggéré que l’intelligence artificielle pourrait offrir de nouvelles opportunités aux créateurs. Cependant, il n’a pas encore proposé de solution concrète pour garantir une rémunération équitable des créateurs de contenu.

Ce débat met en lumière les défis éthiques et économiques posés par les technologies de nouvelle génération. L’innovation doit s’accompagner d’une réflexion sur son impact sur les créateurs et les travailleurs du web.

Arc : Une menace pour les créateurs de contenu ?

Arc se distingue des autres navigateurs web en repensant fondamentalement l’apparence et le fonctionnement de la navigation. Il y parvient en proposant des fonctionnalités innovantes telles que la possibilité de diviser plusieurs onglets verticalement et d’offrir un mode image dans l’image pour les vidéoconférences Google Meet.

Depuis quelques mois, Arc s’est lancé dans l’intégration de l’intelligence artificielle, avec des fonctionnalités telles que les résumés automatiques de pages web, l’intégration de ChatGPT et la possibilité pour les utilisateurs de basculer leur moteur de recherche par défaut sur Perplexity.

Ce rival de Google utilise l’IA pour répondre aux requêtes de recherche en résumant les pages web dans une interface de type chat et en fournissant de minuscules citations des sources.

La fonction « Browse for Me » place Arc au cœur d’un des plus grands dilemmes éthiques de l’IA : qui rémunère les créateurs lorsque des produits d’IA détournent et réutilisent leur contenu ?

« La meilleure chose à propos d’Internet, c’est que quelqu’un de passionné par quelque chose crée un site Web sur ce qu’il aime », a déclaré Anil Dash, entrepreneur technologique et pionnier du blogging, à Engadget. « Mais cette nouvelle fonctionnalité d’Arc risque d’atténuer ce phénomène. »

Dans un billet publié sur Threads peu après la sortie de l’application d’Arc, il a critiqué les moteurs de recherche modernes et les chatbots d’IA qui aspirent le contenu d’Internet et visent à empêcher les gens de visiter des sites Web, les qualifiant de « profondément destructeurs ».

Les développeurs du navigateur affirment toutefois que leur solution répond à une demande des utilisateurs, et soulignent le fort taux d’utilisation de la fonctionnalité de résumé.

La question de la rémunération des créateurs dans ce nouvel environnement reste non résolue. Trouver un équilibre entre innovation et maintien d’un écosystème numérique sain s’annonce comme un défi crucial.

Est-ce la fin des résultats de recherche ?

Arc Search n’est pas le seul service à utiliser l’IA pour résumer les informations des pages web. Google, le plus grand moteur de recherche au monde, propose déjà des résumés générés par l’IA, qualifiés par certains experts de « bombe larguée au cœur du nœud de l’information ». Arc Search va plus loin en supprimant les résultats de recherche traditionnels, ce qui soulève encore plus de questions.

Le fondateur d’Arc Search compare l’impact potentiel de son navigateur à celui des media numériques sur les journaux imprimés. Il reconnaît que si Arc Search offre une meilleure expérience utilisateur, il « brise quelque chose » et perturbe l’échange de valeurs entre les créateurs de contenu et les utilisateurs.

Un journaliste du Boston Globe compare l’attitude des entreprises technologiques à celle d’un personnage de Jurassic Park, obsédé par la puissance de la technologie sans se soucier de ses conséquences. Il appelle à une réflexion approfondie sur l’utilisation de l’IA dans le domaine du web.